L’accueil est aujourd’hui poussé au plus haut niveau de sophistication et d’excellence, mais il se révèle aussi être le miroir des évolutions de notre société, devant assumer les grands paradoxes de notre monde actuel. Nous explorons ici les besoins profonds des clients et les contradictions qu’ils génèrent et auxquelles le personnel en contact est constamment confronté.
Paradoxe #1: La sur-information et le besoin de vraie valeur ajoutée
Aujourd’hui, les clients vivent le paradoxe de l’information à outrance orchestrée par les nouvelles technologies et le digital. Ils ont accès et veulent obtenir toutes les informations en un seul clic, et ainsi pouvoir agir sur les variables de leur séjour.
Et en même temps, envahis par cette masse d’informations et de sollicitations, ils n’ont plus vraiment le temps de traiter toutes ces données et se retrouvent perdus dans leur choix final, voire même leurs besoins réels. Ils demandent donc d’être conseillés, et déléguer leurs besoins pour trouver une vraie valeur ajoutée à l’organisation de leur séjour et la réalisation de leurs désirs profonds. Pour cela, il leur faut des informations précises, ciblées et personnalisées, permettant de construire une valeur intrinsèque et une relation unique avec les acteurs, auxquels ils accordent leur confiance et avec lesquels ils choisissent d’interagir. Ils s’attendent aussi à ce que l’interaction avec le personnel en contact dans l’hôtellerie et le tourisme permette l’accès à des compétences uniques et des connaissances locales.
Paradoxe #2: Le besoin d’immédiateté et la nécessité de trouver du temps
Le deuxième paradoxe est celui de l’immédiateté et le besoin de performance que génère notre société d’aujourd’hui avec ses injonctions consuméristes pour aller toujours vite et tout posséder. Les clients sont épuisés et jamais repus, en quête de temps pour eux-mêmes, pour ralentir, prendre du recul et retrouver du sens à leur vie, à leur action, à leur vouloir. Devenus techno-dépendants, avec ce besoin d’être connectés à tout instant, quelle que soit leur localisation et le terminal utilisé (ATAWAD), ils ont désormais un calendrier tellement serré que leur vrai besoin: celui de trouver du temps pour eux-mêmes, est totalement négligé. On parle de « temps discrétionnaire », c’-à-d un temps pour ne rien faire, ou faire autre chose que travailler ou régler les tâches administratives en se connectant sur des écrans. Vivre ce moment lors de leurs vacances est d’ailleurs le plus souvent souhaité dans le plus grand dépouillement et la simplicité.
Ce paradoxe biaise également l’attitude dans l’accueil. Les clients veulent tout anticiper, tout contrôler pour avoir leurs désirs comblés. Il en est de même, en retour, des hôtels qui mettent en place des standards pour répondre à tous les besoins possibles. Mais cela ne conduit pas à un accueil authentique. Pour cela, il faut être en relation dans l’instant présent et construire ensemble l’expérience, avec une part d’imprévus et une pleine ouverture à soi-même, à l’environnement et aux autres.
Paradoxe #3: Être hyper-connecté et le besoin d’interactions humaines
Il y a un paradoxe dans notre communication actuelle. A force de communiquer en virtuel sur tous les canaux, les clients s’isolent de tout contact réel et ont soif de chaleur humaine et d’échanges interpersonnels dans la vraie vie. Les clients sont tellement happés par les connexions virtuelles, les médias sociaux et les périphériques numériques, qu’ils se retrouvent coupés du réel. Cette vie solitaire, avec une dépendance technologique, contribue à créer un profond manque de relations interpersonnelles. C’est pourquoi, les clients désirent en réalité retrouver le contact humain et les échanges de la vraie vie.
L’hôtellerie aussi a réduit énormément les contacts humains comparé au passé. Le service a complètement évolué pour se tourner vers l’efficacité au meilleur prix, et de nombreux services à la personne ont été abandonnés. « Dans la chambre même, une femme de ménage vidait les sacs, les clients posaient leurs chaussures pour le cirage et un majordome sur place prenait leur commande pour leur faire monter le petit déjeuner. Il y avait des échanges humains constants dans l’hôtel. Ces interactions ont disparu aujourd’hui pour du service digital, or ce désir de contacts humains se retrouve dans le besoin d’être accueillis. »(Gouirand)
Paradoxe #4: Se remplir d’expériences et le besoin de faire le vide
Enfin, il y a aussi une contradiction dans la recherche de l’authenticité. Elle se fait très souvent à travers des expériences extérieures, alors qu’elle se trouve dans l’écoute de ses propres sensations intérieures. La recherche d’émotions « extraordinaires » peut même devenir compulsive et servir d’échappatoire à soi-même; et plus on s’oublie, moins on se retrouve, plus on recherche en dehors de soi-même ce besoin de plénitude, de se sentir comblé. Leur besoin réel est donc de se relier à eux-mêmes, ce qui n’est souvent possible qu’en se déconnectant de l’extérieur.
En conclusion, on constate une profonde mutation qui se joue aujourd’hui dans l’accueil pour répondre aux besoins complexes, parfois confus, et même paradoxaux des clients. Les voyageurs recherchent désormais une vraie valeur ajoutée et des structures d’accueil uniques, offrant une expérience émotionnelle à chaque séjour, avec une immersion culturelle et un retour vers soi. De plus, il faut co-créer avec chaque client l’expérience de l’accueil qu’il souhaite, en répondant à tous ses besoins conscients ou inconscients du moment. Seul un personnel à l’écoute, qui manifeste une réelle compassion peut déceler tout cela, dans une relation hautement personnalisée, et y répondre dans l’excellence et avec les petites touches et détails discrets qui transforment l’expérience en enchantement.